Habitation
Retour11 mai 2023
Des chercheurs veulent imprimer des maisons
©Courtoisie
L’arrivée des maisons imprimées.
Un consortium d’une douzaine de chercheurs qui proviennent de différents établissements d’enseignement postsecondaires ou de centres collégiaux de transferts de technologie (CCTT) du Québec, dont INÉDI, CCTT du Cégep de Lanaudière à Terrebonne, souhaite construire des bâtiments modulaires durables fabriqués par impression 3D. Ce projet, mené par un ingénieur et enseignant du Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue est appuyé financièrement par le Fonds de recherche du Québec – Nature et technologies (FRQNT), à hauteur de 900 000 dollars sur trois ans.
En juin 2022, il manquera environ 600 000 logements au Québec en 2030. Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, touchant plusieurs secteurs économiques dont le milieu de la construction, la province devra donc accélérer le rythme de croissance de son parc immobilier, avec un effectif ouvrier similaire, voire moindre. L’un des objectifs du tout nouveau Regroupement innovant pour l’impression d’immeubles durables (RI³D-FRQNT) est d’être en mesure, au terme des trois prochaines années, de construire des appartements avec moins de personnel et d’ériger des habitations plus abordables. Le prototype fonctionnel, un bâtiment modulaire imprimé au Québec, sera conçu et assemblé en 2025 pour Habitat pour l’humanité Québec.
« La fabrication additive évolue dans une multitude de domaines, dont celui de l’habitation, car il est possible d’explorer rapidement différentes formes et matériaux. Grâce aux expertises complémentaires réunies dans notre regroupement, nous aurons l’opportunité de faire progresser les connaissances dans l’impression de bâtiments adaptés à notre climat québécois, tout en ayant en tête d’utiliser des matériaux à plus faible empreinte environnementale », explique Elisabeth Laroche, chercheuse au CCTT INÉDI du Cégep de Lanaudière à Terrebonne, impliquée dans le projet.
« Nous proposons d’évaluer les gains potentiels d’une technologie émergente, soit l’impression 3D à grande échelle, et de l’utiliser pour imprimer des modules qui seront assemblés pour construire un bâtiment. L’impression en usine de modules permet l’édification de petits et de grands immeubles douze mois par année, en diminuant les coûts de production et en accélérant la cadence de construction, et ce, dans le but d’augmenter l’accès à la propriété des Québécoises et des Québécois », lance David Laliberté, enseignant au Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue et initiateur de la démarche.
Utilisé ailleurs dans le monde
Cette technologie, qui est déjà utilisée ailleurs dans le monde, permet notamment de, produire plus rapidement la partie structurelle d’un bâtiment comparativement aux pratiques traditionnelles nécessite moins de main-d’œuvre par logement construit, utilise moins de matériaux en réduisant les pertes, fait des formes arrondies, plus fortes structurellement.
Au Canada, plus précisément en Ontario, des bâtiments ont déjà été imprimés sur site en 2022. L’approche proposée par le RI³D-FRQNT est toutefois différente, puisqu’elle propose l’impression de modules en usine qui seront transportés et assemblés sur site ultérieurement.
« Cette méthode offre plusieurs avantages selon nos hypothèses, soit d’utiliser une plus petite imprimante, donc moins coûteuse, de ne pas déplacer l’imprimante, de permettre un gain de temps et de construire de grands bâtiments en multipliant les modules ce qui pourrait favoriser la densification du cadre bâti », soutient pour sa part le directeur du Service technique de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ), Marco Lasalle.
Le RI³D-FRQNT devra toutefois se pencher sur les matériaux utilisés par cette nouvelle technologie, puisque le béton est une matière avec un bilan carbone plutôt décevant.
« Le regroupement vise à faire des recherches sur des bétons plus verts, sur des matériaux imprimables alternatifs et sur l’efficacité énergétique des bâtiments imprimés », nuance cependant le professeur Ammar Yahia, qui est titulaire d’une chaire industrielle du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG) sur les bétons fluides à rhéologie adaptée.
Projet ambitieux
Il s’agit d’un projet ambitieux et c’est pour cette raison qu’une vaste recherche scientifique sera entamée au cours des prochaines semaines par une équipe dotée d’une expertise pour le moins impressionnante incluant des compétences diverses et complémentaires en génie, en architecture, en matériaux cimentaires, en matériaux forestiers, en prototypage rapide, en logistique et manutention, en environnement, etc.
Les compétences de six cégeps, de deux universités et pas moins de six centres collégiaux de transfert de technologie sont mises à contribution.
Pour mener à bien ce projet, l’équipe de David Laliberté comptera donc sur un financement de 900 000 dollars du FRQNT, et à cela s’ajoutera une contribution financière et en nature estimée à 300 000 dollars sur trois ans venant de l’ensemble des partenaires, pour un total de 1,2 million de dollars.
« Nous sommes très heureux d’avoir pu obtenir le soutien financier du FRQNT, sans lui, on ne pourrait envisager ce projet », commente l’enseignant.
« Je suis très heureuse du soutien accordé par le FRQNT au professeur Laliberté pour la mise en place de RI³D-FRQNT, déclare la directrice scientifique du FRQNT, Janice Bailey. L’expertise scientifique que l’on retrouve dans nos regroupements de recherche, de même que l’excellence et la compétitivité dont ils font preuve, les place à l’avant-garde de leur domaine. Je salue le fait que la recherche au sein de ce nouveau regroupement de recherche collégial sur les immeubles durables se fera de manière interordre, interdisciplinaire, et interregroupements de recherche, un moyen privilégié selon moi pour renforcir et développer l’écosystème de recherche québécois.
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